Affleurement
J’habite une chaîne de montagne qui se jette dans les mers. Des deux côtés de la frontière – catalane et française – j’explore cet éléments solide. Cette superposition des roches est une réflexion sur l’histoire de la peau de la Terre. Les roches cristallines peuvent se prolonger indéfiniment en profondeur, elles sont le socle de toutes les autres roches. Les sédimentaires les recouvrent en couches superposées, et, les métamorphiques sont d’anciennes roches sédimentaires transformées. L’affleurement désigne donc en géologie l’apparition d’une roche à la surface du sol. C’est aussi poétiquement ce qui apparaît à fleur. Et symboliquement une forme de mise à nu où le caché devient visible. Quelque chose apparaît, émerge et se transforme lentement. C’est dans toutes ces dimensions que je ressens le paysage, son étendue, son épaisseur, sa densité. Un territoire est d’abord pour moi un sol sur lequel nos corps gravitent. Phonétiquement, l’affleurement se confond, se rapproche de l’effleurement, qui est un geste fragile presque invisible. C’est un touché, un trouble, et le début d’une entrée en intimité avec ce qui vit sous nos pas depuis des millénaires.